La maire de Vitré enlaçant son cher, très cher, panneau retrouvé
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Au début du mois de mars, comme nous l’avons indiqué ici, d’audacieux habitants de Vitré dérobaient les panneaux tout récemment posés pour annoncer à la population que leur bonne ville serait désormais affublée du nom de Gwitreg – nom inventé par les nationalistes bretons acharnés à celtiser la Bretagne gallèse.
Le président d’une association de défense du parler gallo, la Granjagoul, ayant fait observer que Vitré ne s’était jamais appelé Gwitreg, s’indignait de cette opération destinée, selon lui, aux touristes. Que ne comprenait-il les véritables enjeux de cette réfection du cadastre…
Quoi qu’il en soit, le breton n’ayant jamais été parlé en ces lieux, pourquoi, s’il fallait une signalétique bilingue, avoir éliminé le gallo ? Nulle réponse : la mairie s’est contentée de porter plainte pour vol de mobilier urbain.
Le 9 avril, ô surprise, les panneaux réapparaissaient ! Et, ô surprise encore, en compagnie de petits cousins, les panneaux Roazhon, pour Rennes, et Gwern-ar-Sec’h, pour Vern-sur-Seiche, le tout déposé devant la mairie de Carhaix ! Carhaix, cœur du nationalisme breton, ville soumise au pouvoir du pire maire autonomiste que compte la Bretagne, le redoutable Troadec, défenseur du breton surunifié, des panneaux bilingues, des Bonnets rouges, voire des terroristes du FLB, dont son affidé Charlie Grall… et surtout connu pour ses soirées arrosées… Y avait-il une allusion à quelque ribote suivie de farces bien dignes du facétieux esprit gallo ?
Mais non, nulle farce ! Le lendemain, une mystérieuse « Brigade Albert Poulain » revendiquait cette action dans Le Poher, relais local de l’idéologie troadéquienne.
C’est donc sous l’égide de feu Albert Poulain, collaborateur, avec d’autres militants ethnistes des droites extrêmes, de la revue Ordos, vieux militant du MOB de Fouéré, nationaliste issu des cercles néodruidiques, par ailleurs bon chanteur, que se plaçaient les voleurs de panneaux…
Leur communiqué, digne des productions du FLB de la grande époque, expliquait que si les panneaux avaient été offerts à Troadec, c’était – qui l’eût cru ? – avec la certitude qu’en tant que vice-président du Conseil régional en charge des langues de Bretagne, vu son amour du panneau bilingue, il ne manquerait pas de les rendre aux communes celtisées.
Le communiqué de la Brigade Albert Poulain mérite d’être cité in-extenso :
« Nous revendiquons la dépose de panneaux de signalisation devant la mairie de Carhaix, dont le maire Christian Troadec est également chargé des langues de Bretagne à la Ragions. Rappelons que le gallo est la langue de haute Bretagne et est prioritaire à tout affichage bilingue préalable. Les panneaux déposés proviennent tous d’affichage bilingues non-conformes de haute Bretagne. Il incombe désormais à Christian Troadec de les restituer à leurs propriétaires.
L’ensemble des brigadiers attendent désormais deux impératifs dont Christian Troadec a les compétences : 1) que les recommandations internationales sur les minorités culturelles deviennent la norme du pouvoir politique breton. 2) que cesse l’escroquerie de l’office public de la langue bretonne et qu’il se mette en conformité avec la législation française lors de tous ses démarchages auprès des collectivités territoriales.
Nous, tous et toutes, connaissons le courage politique dont Christian Troadec est capable. Une non-réponse de sa part à nos deux revendications ne fera que renforcer notre détermination collective afin de faire reconnaître nos droits.
La brigade Albert Poulain affirme clairement son soutien à nos camarades bas-bretons en lutte contre la francisation de leurs toponymes. Ce soutien pourrait devenir actif. Nous affirmons également notre soutien indéfectible à toutes les minorités, qui a travers le monde, luttent contre les impérialisme linguistiques. Quelques soient leurs visages et leurs intensités. »
Ce document donne la mesure de la guerre des ethnies à laquelle la Bretagne se trouve soumise. Le gallo surunifié baptisé langue gallèse bénéficie de quelques maigres subventions, 95 % de l’argent public allant à la promotion d’une langue bretonne partout imposée comme langue des origines. L’épisode des panneaux a le mérite de mettre en lumière le mécanisme de la colonisation. Isabelle Le Callennec, la maire de droite de Vitré, l’explique avec candeur : « Pendant la campagne des municipales, l’Office de la langue bretonne est venu me voir et me demander l’installation de panneaux en breton. À Vitré, 80 enfants apprennent le breton. Nous en avons discuté en conseil municipal et nous avons posé les panneaux. »
C’est aussi ce que dit le maire de Vern-sur-Seiche : « Dans la commune, nous avons une école où on apprend le breton aux enfants, cela nous a semblé logique d’inscrire son nom en breton. » La logique qui s’applique est celle que l’on dirait poutinienne de la domination de l’ethnie : une école primaire s’ouvre pour assurer en pays gallo un enseignement en breton au motif que la langue de la Bretagne est naturellement le breton ; suit la rebaptisation de la ville, sans la moindre consultation des habitants. La domination de l’ethnie s’appuie sur la fabrique d’une histoire nationale. Isabelle Le Calennec explique – encore elle et avec la même candeur accablante – pour apaiser les défenseur du gallo :
« La langue, c’est l’âme d’un pays, c’est très important. Cette identité, c’est une fierté, une richesse. Mais je ne veux pas non plus qu’on vienne me dire que Vitré n’est pas en Bretagne. Vitré est une ville bretonne ! On a même eu un ministre des finances breton qui était originaire de Vitré (ndlr : Pierre Landais, maître des finances du duché de Bretagne au 15ème siècle). C’est à Vitré aussi qu’on a créé le Gwen ha du (le drapeau breton créé par Morvan Marchal). »
La maire donne donc comme références Pierre Landais, incarnation de l’affairisme breton, pendu pour corruption (et présenté par les nationalistes bretons d’extrême droite, dont Yves Mervin le fondateur du Cercle Pierre Landais, comme le pionnier de l’indépendantisme) et Morvan Marchal, autre indépendantiste, collaborateur des nazis, inventeur du drapeau antirépublicain devenu le symbole de la nation bretonne. Un escroc et un agent de la Gestapo : les grands hommes de Vitré à en croire sa maire.
Laquelle ajoute en prime cet aveu : « Ce sont des panneaux réglementaires, ça coûte très cher et c’est de l’argent public, ils sont payés par nos impôts. » Payés par nos impôts pourquoi ? Au moment où les fonds publics manquent et où la révolte gronde…
De fait, tout ça coûte très cher – et, en conclusion, le maire de Vern-sur-Seiche a cette parole extraordinaire : « Ces derniers temps, il y a un engouement contre la langue bretonne. »