Le conseil régional demande l’autonomie de la Bretagne 

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La France et ses nations ethniques d’après l’autonomiste Paul Sérant

Cela semble surréaliste mais non : le ministre de l’Intérieur étant accouru en Corse pour proposer d’office l’autonomie à cette nation opprimée pleurant le deuil d’un terroriste méritant, les autonomistes bretons se sont engouffrés dans la brèche, ou plutôt la porte large ouverte. Et tous les élus de suivre – sauf, à leur grande surprise, les élus du Rassemblement national, qui se sont soudain découverts, pour reprendre le mot de leur chef de file, « les seuls républicains. » C’est Aziliz Gouez, élue sur la liste « Breiz-a-gleiz – autonomie écologie territoires » qui a porté cette revendication avec le soutien d’autres autonomistes, Nil Caouissin et Paul Molac, issus de l’UDB (parti qui a toujours fait des scores dérisoires). Aziliz Gouez, qui se présentait naguère sur la liste « socialiste  » de Raphaël Glucksman est ensuite passée chez les Verts tout en soutenant les pires projets de l’Institut de Locarn et en fréquentant la Fondation Fouéré (car ce militant nationaliste collaborateur des nazis bénéficie d’une fondation).

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Aziliz Gouez soutenant le projet de formation des élites managériales bretonnes avec Alain Glon, président de l’Institut de Locarn, à gauche, et l’autonomiste Jakez Bernard, président de Produit en Bretagne, à droite)

Après avoir réussi à prendre la vice-présidence de Nantes métropole pour faire avancer la « réunification », pièce essentielle du dispositif destiné à faire de la Bretagne une nation indépendante, elle porte donc le projet du lobby patronal breton : d’abord l’autonomie, et surtout l’autonomie fiscale, car les patrons bretons ne veulent plus payer pour les autres, puis la marche à l’indépendance sur le modèle catalan (que prônait d’ailleurs naguère Jean-Yves Le Drian). 

On remarquera l’étonnante discrétion de la presse régionale (sous contrôle du lobby de Produit en Bretagne, issu de l’Institut de Locarn) : « Bretagne. La Région demande à l’État davantage d’autonomie », titre Ouest-France avec une prudence jésuitique, manifestement destinée à ne pas effrayer le chaland. 

Les journalistes de FR3 Bretagne parviennent mal à cacher leur stupeur, évoquant « un vœu totalement inédit» et s’étonnant du rôle invraisemblable joué par le microscopique « Breizh-a-gleiz » (Bretagne à gauche) soutenu aussi bien par les socialiste que par la droite affairiste, notamment par Marc Le Fur, le « député du cochon ». 

Pour Le Télégramme, Philippe Créhange, auteur d’un essai à la gloire du Club des Trente, affiche une modération qui cache mal son espoir de voir arriver le « grand soir  » (le « grand soir breton » écrit-il, comme si la Révolution devait venir se confondre avec le retour à la Bretagne des ducs et ainsi effacer l’horrible règne de la France « jacobine » dénoncé par le fondateur de l’Institut de Locarn).  

Ce tour de passe-passe s’est joué au nom des Bretons et à leur insu : alors que la guerre en Ukraine et les élections présidentielles retenaient leur attention, ils se sont réveillés autonomistes sans le savoir.

Reste à se demander pourquoi ils ne seraient pas consultés sur ce projet d’autonomie – et pourquoi les Français ne seraient pas consultés sur ce démantèlement de la France par les périphéries au nom du « nouvel égoïsme territorial » prôné par les régions riches (comme la Bretagne) au mépris de toute égalité. « N’ayons pas peur. Toutes les régions n’ont pas vocation à avancer dans la même direction que la nôtre », clame Marc Le Fur – car il y a des régions à identité faible qui n’ont aucun besoin d’être autonomes. Et des régions pauvres qui doivent apprendre à se contenter de peu.

La France des ethnies se met en place pour le plus grand profit du capitalisme. 

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