Le 20 décembre 2011 au matin, profitant de l’absence de leurs collègues, un député UMP, Marc Le Fur, et un député Europe-Écologie (parti allié aux autonomistes), s’associent à des parlementaires alsaciens pour faire passer un amendement autorisant le département de la Loire-Atlantique à bénéficier d’un référendum qui lui permette de décider seul de se rattacher ou non à la Bretagne. L’amendement est voté par seize voix contre neuf.
S’ensuit un concert de louanges dans la presse régionale : « les Bretons » triomphent contre les autres, les « non-Bretons », les étrangers…
Nul ne s’indigne du tour de passe-passe antidémocratique, du discours ethniste tenu à ce propos, et de l’union de la gauche et de la droite sur le thème « ni rouge ni blanc, Breton seulement », mot d’ordre des nationalistes d’extrême droite.
Le 10 janvier 2012, l’amendement a été voté par l’Assemblée, le PS s’abstenant.
Un seul article critique à ce propos, celui de Gérard Hamon, d’abord publié dans le bulletin de la Ligue des Droits de l’Homme de Rennes.
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Pour quelques députés qui ne se sont jamais fait remarquer pour leur action sur des questions importantes actuelles comme le chômage, l’accès aux soins ou la scolarisation, les habitants des Pays de la Loire ne devraient pas tous avoir leur mot à dire sur la déstructuration de leur région. Pour ces élus en mal de reconnaissance, l’égalité des citoyens n’a pas cours à l’est de l’Ille-et-Vilaine et de la Loire-Atlantique. Les habitants de la Mayenne, du Maine-et-Loire, de la Sarthe et de la Vendée ne sont pas nos concitoyens, ils n’ont que le droit d’être spectateurs de choix qui concernent leur avenir. Que certains habitants de la région Bretagne s’en réjouissent ne surprend pas : depuis près d’un siècle, on sait que certains sont prêts à toutes les iniquités pour réaliser leurs rêves. Que des élus de tous niveaux issus d’élections destinées à faire fonctionner la démocratie s’alignent derrière eux sans plus de réflexion et de perspicacité est plus choquant. Certes, la questions de la restructuration des régions n’a pas à être tabou, mais elle doit préserver le respect de tous et se faire sans raisonnements simplistes. Ne serait-il pas du devoir des politiques de donner de la profondeur aux réponses possibles ? Outre cette question d’égalité, ces élus ne devraient-ils pas nous dire suivant leurs orientations politiques quelles améliorations sérieuses à la vie des habitants apporterait la restructuration qu’ils souhaitent ? Ne devraient-ils pas évoquer quel en serait le prix à payer ? Je ne pense pas que l’intégration de la Loire-Atlantique à la région Bretagne se ferait sans frais, sans oublier les pertes et difficultés à compenser pour les autres départements de la région Pays de la Loire. Ce ne sont là que quelques remarques d’un citoyen de la République, il y a sans doute beaucoup d’autres remarques à faire. Je sais que nos élus au niveau national disposent de temps et de revenus suffisants pour réfléchir. Aussi peut-on attendre d’eux plus que des vociférations dans les travées de l’Assemblée nationale, l’organisation de visites du Palais Bourbon ou du Palais du Luxembourg. Contribuer à éclairer les citoyens ne relève-t-il pas de leur devoir ? S’ils ne le pensent pas ou ne le veulent pas, au non intérêt et au désintérêt exprimés par des abstentions conséquentes à chaque élection, il risque de s’ajouter une dose de mépris.
Gérard Hamon